Je vous ai montré, n'est-ce pas, ces dessins que je fais, ces temps ci, pour apprendre à représenter un arbre. Les arbres ? Comme si je n'avais jamais vu, dessiné d'arbre. J'en vois un de ma fenêtre. Il faut que patiemment je comprenne comment se fait la masse de l'arbre, puis l'arbre lui-même, le tronc, les branches , les feuilles. D'abord les branches qui se disposent symétiquement, sur un seul plan. Puis comment les branches tournent, passent devant le tronc... Ne vous y trompez pas : je ne veux pas dire que, voyant l'arbre de ma fenêtre, je travaille pour le copier. L'arbre, c'est aussi tout un ensemble d'effets qu'il fait sur moi. Il n'est pas question de dessiner un arbre que je vois. J'ai devant moi un objet qui exerce sur mon esprit une action, pas seulement comme arbre, mais aussi par rapport à toute sorte d'autres sentiments... Je ne me débarrasserais pas de mon émotion en copiant l'arbre avec exactitude, ou en dessinant les feuilles une à une dans le langage courant... mais après m'être identifié en lui. Il me faut créer un objet qui ressemble à l'arbre. Le signe de l'arbre. Et pas le signe de l'arbre tel qu'il a existé chez d'autres artistes... par exemple chez ces peintres qui avaient appris à faire le feuillage en dessinant 33, 33, 33, comme vous fait compter le médecin qui ausculte ... Ce n'est que le déchet de l'expression des autres... Les autres ont inventé leur signe... Le reprendre, c'est reprendre une chose morte : le point d'arrivée de leur émotion à eux, et le déchet de l'expression des autres ne peut être en rapport avec mon sentiment original.
Henri Matisse - Extrait " Ecrits et propos sur l'art"
Et
Vitrail, étude pour « l'Arbre de Vie », Nice d'Henri Matisse Le musée Matisse conserve deux essais du vitrail de L’Arbre de vie de la chapelle des Dominicaines du Rosaire de Vence. Pour Matisse, la chapelle est comme un livre dont certaines pages sont en couleurs, les vitraux, et d’autres en noir et blanc, les panneaux de céramique, de Saint Dominique, de la Vierge à l’enfant et du Chemin de croix. Avant d’aboutir à L’Arbre de vie, Matisse travaille successivement deux compositions en papiers gouachés découpés : Jérusalem céleste, constituée de surfaces géométriques à dominante rouge (1948, Musée national d’art moderne, Centre Georges Pompidou, Paris), puis Vitrail bleu pâle (1949, Musée national d’art moderne, Centre Georges Pompidou, Paris) composée de surfaces géométriques sur lesquelles se détachent des formes végétales, souvenirs du voyage à Tahiti de 1931. Cependant, Matisse, n’ayant pas tenu compte des contraintes techniques du montage du vitrail, conçoit une nouvelle composition, où les formes végétales de palettes de cactus bleu aux fleurs jaunes symbolisent la vie qui résiste à la sécheresse et à la mort. Les verres bleu outremer et vert bouteille transparents permettent de voir le paysage ; l’opacité du jaune citron évoque l’éblouissement de la lumière. Il doit cette réussite à sa collaboration avec le maître verrier Paul Bony et la verrerie de Saint-Just-sur-Loire, toujours en activité aujourd’hui, qui conçut tout spécialement pour lui le jaune dépoli. La combinaison des couleurs primaires crée d’une manière imprévue, selon les heures, un reflet magenta qui se diffuse dans l’atmosphère blanche de la chapelle.



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RépondreSupprimerEn octobre, quand l’or triomphe en son feuillage,
Mes pas larges encore, quoique lourds et lassés,
Souvent ont dirigé leur long pèlerinage
Vers cet arbre d’automne et de vent traversé.
Comme un géant brasier de feuilles et de flammes,
Il se dressait, superbement, sous le ciel bleu,
Il semblait habité par un million d’âmes
Qui doucement chantaient en son branchage creux.
J’allais vers lui les yeux emplis par la lumière,
Je le touchais, avec mes doigts, avec mes mains,
Je le sentais bouger jusqu’au fond de la terre
D’après un mouvement énorme et surhumain ;
Et J’appuyais sur lui ma poitrine brutale,
Avec un tel amour, une telle ferveur,
Que son rythme profond et sa force totale
Passaient en moi et pénétraient jusqu’à mon coeur.
(…)
Verhaeren (L’Arbre, extrait)
@ Aramis, il y a très longtemps que je n'ai pas lu des vers d'E Verhaeren... merci pour ce rebond !
SupprimerMon père un homme des Flandres, instituteur de formation, chérissait Verhaeren, son presque compatriote. Il travailla son œuvre jsqu'à ses derniers jours. Bien que très jeune alors (10 ans) je me souviens qu'il disaiit par cœur nombre de ses poèmes. L'arbre, pourtant assez long, était l'un de ses préférés, avec
Supprimer"Sur la bruyère, longue infiniment, voici le vent cornant novembre…"